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Livré en vrac

9 août 2020

Petite histoire des vacances scolaires

Sous l’Ancien Régime, les jours de congés correspondent essentiellement aux fêtes chrétiennes et au calendrier liturgique (Epiphanie, Saint-Charlemagne, Sainte Geneviève, Pentecôte, Carnaval, Assomption, Toussaint, Sainte-Catherine, Ascension, Fête-Dieu, fête paroissiale etc). Le plus gros des congés étant condensé sur août/septembre. Ces vacances d’été correspondant en effet à l’aide que les enfants devaient apporter lors des vendanges et de la moisson.

Mais même ainsi les usages en matière de début des congés et de durée de ceux ci restent essentiellement locaux et le resteront longtemps d’ailleurs: ainsi début 1600, au collège d'Arras la sortie a lieu le 25 août et les vacances durent jusqu'au 10 octobre; au collège d'Abbeville, au XVIIIe siècle, les vacances débutent le 15 août et durent environ un mois et demi.

Avec la révolution, la durée des vacances reste fixée à une soixantaine de jours entre le milieu d'août et la fin septembre et des jours de repos sont prévus à certains moments de l’année.

Une fois la période révolutionnaire terminée, retour aux pratiques d’antan : dans toutes les écoles, les congés dits extraordinaires (donc autres que ceux d’été) sont liés à nouveau aux fêtes religieuses comme par le passé. Mais avec une volonté de réduire le nombre de ces petits congés.

Ainsi au début du Consulat en 1800 les seules vacances accordées sont celles d’été et il faudra attendre 1860 pour que Napoléon III accorde 5 jours de vacances supplémentaires pour les fêtes de Pâques.

Il est même question à cette époque de réduire les vacances dans les écoles secondaires à une quinzaine de jours en août. Un arrêté du 2 septembre 1800 va aller jusqu'à les supprimer, accordant seulement « aux élèves qui se seront bien conduits, la permission d'aller en vacances tous les deux ans ».

Finalement en 1803 on revient aux pratiques d’antan en réinstaurant 7 semaines de congés d’été ainsi que d’autres petites périodes de vacances au cours de l’année.

La durée de ces congés d’été est toutefois très fluctuante et va dépendre essentiellement des pratiques de vie des différentes époques : d’une société essentiellement paysanne jusqu’au milieu du 20ème siècle la France va en effet se transformer peu à peu en une société de consommation et de loisirs avec les premiers congés payés et l’apparition du tourisme ; tout cela va nécessairement influer sur les vacances de nos chères têtes blondes.

Et c’est ainsi qu’en 1814 on rabote un peu les vacances d’été : on en est à 6 semaines.

En 1851, il est confié aux recteurs départementaux le soin de fixer la date et la durée des vacances d’été entre août et octobre pour une durée de l'ordre d'un mois.

En 1875, le début des congés est fixé au 9 août.

1882 marque la grande année de l’éducation nationale puisque la loi Ferry rend l’école laïque, publique et obligatoire. Mais en pratique ne nous leurrons pas, cela ne va pas changer grand-chose dans l’immédiat.

D’abord parce que ce seront les préfets qui désormais vont donner la date de départ en vacances ; on est donc toujours sur des plages de vacances différentes en fonction des départements. Rien n’est uniformisé.

Et surtout l'absentéisme ne va pas disparaître comme ça. On estime en 1890 qu'il est de l'ordre de 15 %. En 1929, le taux d'absentéisme est encore d'environ 10 % et c'est en 1942 que le régime de Vichy décide de supprimer les allocations familiales aux familles coupables de ne pas envoyer leurs enfants à l'école.

Toutefois il faut bien garder en tête que globalement la situation des villes et des campagnes est très différente : dans les écoles primaires rurales, l'absentéisme saisonnier est beaucoup plus important que dans les villes. Ainsi le Manuel général de l'instruction primaire signale en 1834 que, des premiers jours d'avril ou de mai jusqu'à la fin d'octobre ou quelquefois de novembre, « le retour régulier des travaux agricoles enlève à nos écoles toute leur population ». Ce sera un mal récurrent chaque année qui ne va réellement disparaître qu’avec la fin de la petite paysannerie française au XXème siècle.

En 1888 la durée des congés d’été passe de 4 semaines à 9 semaines.

L'arrêté du 4 janvier 1894 restreint les grandes vacances à six semaines, mais prévoit que « lorsque les besoins des populations l'exigent et avec l'assentiment du conseil municipal », la fermeture des classes peut être limitée à quinze jours.

L'arrêté du 24 juillet 1905 s'attaque aux congés extraordinaires et les réduit à une semaine pour les fêtes de Pâques, au premier de l'an, au lundi de Pentecôte et au lendemain de la Toussaint; s'y ajoutent les jours de fêtes patronales et la célébration du 14 juillet.

En 1912, le début des ‘’grandes vacances’’ est avancé au 14 juillet ; mais elles durent jusqu’au 1er octobre.

En 1922 le manque de main d'oeuvre dans les champs se fait cruellement sentir. Le ministre de l'Instruction publique octroie donc aux écoliers deux semaines de vacances supplémentaires afin qu'ils puissent aider au travail agricole.

En 1925, les petites vacances sont à l’honneur ! on a désormais deux semaines de vacances à Noël ; les vacance de Pâques passent d’une semaine à deux.

Sous le Front populaire, en 1936, des ‘’petites vacances’’ apparaissent : quatre jours en février, si Pâques arrive tard ; quatre jours à la Pentecôte, si Pâques est tôt.

En 1938 le ministre Jean Zay considère, dans une note officielle au Conseil supérieur de l'éducation nationale, que « les vacances des enfants doivent être mises en harmonie avec les congés payés des parents » . L'arrêté ministériel du 11 juillet 1938 fixe donc les dates et durées des congés comme suit : deux jours pour la Toussaint, dix jours pour Noël et le jour de l'an, un jour pour mardi-gras, quinze jours pour Pâques, le lundi de Pentecôte et des vacances d'été du 15 juillet au 30 septembre.

En 1959, les grandes vacances sont déplacées dans leur ensemble de deux semaines : elles commencent plus tôt ( le 1er juillet) et finissent plus tôt ( à la mi-septembre ) ; on définit également trois zones académiques décalées l'une par rapport à l'autre en particulier pour les petits congés.

En 1960, les vacances d'été débutent le 28 juin et se terminent le 16 septembre. Mais la France est encore majoritairement paysanne et la circulaire fixant le calendrier scolaire de l’année 1960/1961 précise qu’il est prévu des autorisations d’absences entre les 15 et 30 septembre accordées par l’Inspecteur d’académie, sur demande des personnes responsables, aux enfants ayant au moins douze ans qui sont occupés aux travaux agricoles (article 5, loi du 28 mars 1882), dans les départements viticoles compte tenu des travaux de vendanges (Circulaire du 19 septembre 1960).

En 1972, (après les jeux olympiques d’hiver de Grenoble) les vacances d’hiver deviennent désormais une véritable institution et un marqueur de notre temps : les loisirs et le tourisme se diversifient considérablement et cela ne va plus s'arrêter !

Début des années 80 : rééquilibrage des vacances scolaires :

- « les grandes vacances » devenues « les vacances d’été » vont être amputées de 2 semaines au profit des vacances de la Toussaint avec 10 jours accordés de la fin octobre au 2 novembre, et d’hiver : 2 semaines reparties entre février et mars suivant les académies.

- les deux semaines de vacances de septembre disparaissent définitivement avec l’extinction de ce que l’on a appelé la petite paysannerie française ; nous sommes définitivement rentrés dans l’ère de la société de loisirs !

Bonne rentrée !

Sources

Les rythmes scolaires en France : permanences, résistances et Inflexions - Paul Gerbod

Vacances en France de 1830 à nos jours - André Rauch 

 

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